NOM : Francoeur.
PRENOM : Céleste.
SURNOM : Ciel par sa famille.
ÂGE : 31 ans
METIER/OCCUPATION : Chanteur lyrique.
NATIONALITE : Canadien.
Réfractaire
Caractère & Physique
Seul. Inspire. L'air se bloque dans ses poumons, il ferme les yeux. Écoute les battements de son cœur. Se concentre, expire. Longuement, vidé complètement. Il recommence, encore une fois, puis deux, puis trois. C'est le temps du rituel, celui qui précède chaque entrée. Fait de gestes habituels, qu'il répète sans y penser. La respiration d'abord, une fois les exercices de voix effectués. Puis il est temps de s'habiller, d'enfiler le costume préparé. Aujourd'hui bien sobre au regard du récital qu'il va présenter. Cela lui correspond, l'élégance discrète d'une coupe bien ajustée, l'appréciation d'une matière de qualité. Loin des folies outrancières de l'opéra et de ses débordements de parures et de dorures. Il préfère la sobriété, la veste d'un lainage noir qui recouvre sa chemise immaculée en est un bel exemple. Il faut être impeccable, irréprochable. Ne faire que porter le texte, la voix. Être son premier soutient, inébranlable. Toujours. Ne compter que sur soi-même.
La loge est petite, intime. Enfiler sa veste le fait s'étendre de la porte jusqu'au mur du fond. Il prend toute la place, se déploie dans l'espace confiné tel un oiseau prêt à s'envoler. Mais ce n'est pas encore son heure. Alors il se place face au miroir, continu son cérémonial. Prend le maquillage laissé à son attention et se penche au dessus de la coiffeuse. La femme qui s'est occupée de lui précédemment a fait du bon boulot. Discret, mais suffisant pour atténuer ses cernes et présenter un teint clair face aux lumières particulières. Il se permet un nuage de poudre, puis s'examine, critique dans le reflet. Son œil ciel inspecte l'être qui lui fait face, détaille les légères ridules au coin de ses yeux qu'il devine malgré tout, scrute ses lèvres trop fines, trop pales, qu'il pince alors que son index vient lisser ses sourcils sombres, implacables et parfaitement épilés. Un dernier regard à ce nez un jour cassé, qui en garde une légère marque et surtout cette petite bosse qui le fait tiquer à chaque fois. Claquement de langue, satisfait peut-être. Il se recule, Inspire. Prend le fin ruban en velours gris dans ses longs doigts, noue ses cheveux blonds d'un mouvement leste et habitué alors qu'il relâche sa respiration. Lève les yeux au plafond. Cela va bientôt être l'heure pour lui d'y aller. Il est stressé. Cette douce angoisse, vieille amie dont il ne se défait pas, celle qu'il retrouve avec la même joie à chaque fois. Celle qui lui fait crisper ses doigts, tordre son estomac. Doucement, juste pour montrer qu'elle est là. Alors il l'accueille en son sein, la prend contre lui, et sourit. A son tour maintenant. Il éteint le bâton d'encens boisé qui se consumait à ses côtés et il est temps de quitter sa loge. Le reflet du miroir, dont il croise le regard, sourit calmement. Tranquille. Serein. Il salue d'un signe de tête chacun des visages croisés en coulisse. Trop concentré, imperturbable, il ne décroche pas un mot. Devant lui, les trois dernière marches pour accéder à la scène. Il est l'heure. Lumière.
Un temps. Suspendu. En dehors de tout. La dernière note résonne encore. C'est ce moment, pas encore fini, pas encore perdu. Celui où la respiration s'oublie, où le regard éperdu est encore haut, mais déjà trop bas. Puis c'est l'éclat. Salve d'applaudissements, le public rend son verdict. Le bruit l'atteint alors enfin dans une vague lourde, alors qu'il s'incline respectueusement. Céleste prend tout, goûte ce qu'on lui donne, se love dans le bruit des mains qui battent au rythme de son cœur, se complaît dans la lumière braquée sur lui, reprend son souffle dans cet air saturé de gens, tous entier tournés vers eux, tournés vers lui. Céleste veut, Céleste aime, Céleste prend. Ne veut rien perdre, rien louper de cet instant particulier. Celui sans quoi ce qu'il ferait, ce pour quoi il vit et respire, ne serait rien. Le public, son regard. Pour son art. Il sourit, s'incline à nouveau. Son regard parcourt la salle, avide puis repu. Il salue les musiciens qui ont été sublimes, un geste envers les machinistes, l'équipe technique sans quoi rien de tout cela n'aurait été possible.
Puis il sort.
Rideau.
Nuit.
Sentiment d'insécurité. Ça se voit dans ses yeux trop clairs, pas dans son sourire trop fier. Il paraît serein Céleste, il paraît hautain. Il l'est un peu, peut-être trop sûrement. Parce qu'il sait être doué dans son domaine, parce qu'il sait être intéressant. Et puis c'est un milieu où il ne faut pas tomber, ne pas montrer de faiblesse. Alors il reste doucement ferme, doucement arrogant. Pour retenir les compliments, laisser couler les jugements, prendre la critique du mieux possible pour toujours s'améliorer, s'affirmer. Jamais flancher. Il ne faut pas, pas le moindre faux-pas. Malgré les incertitudes, le sentiment de solitude. Celui qui lui tient le cœur, entre deux déplacements, quand il sait que ce qu'il appelle maison est plus souvent un avion.
Céleste. Un pas grand chose, morceau de tout, morceau de ciel, corps céleste. Poussière d'étoile. Éclat d'un néant, qui cherche sa place en chaque instant, exister pour les gens, au travers d'un regard, se sentir vivant, plus qu'un moment. Ne pas être laissé derrière, dans un coin, oublié, posé là. Sans fonction, sans un regard, retour dans l'ombre, étreinte du noir. Il est fait pour la lumière, a besoin de la sentir sur sa peau, d'être vu, qu'importe si cela paraît imbu. Alors oui, arrogant. Pour exister, se sentir légitime. Prendre la lumière pour ne pas attendre qu'on daigne la lui donner, au cas où on l'oublierait. On n'est jamais mieux servi que par soi-même. Laisser de côté ce petit garçon qu'il n'a jamais soigné, celui qui regardait partir ses parents trop souvent, sans savoir quand ils rentreraient, s'il aurait un mot d'affection un peu bancal à leur retour, de ces deux personnes pas très doués avec les démonstrations d'amour. Ce petit garçon qui souriait cassé, dans les cours de récré, quand les rires trop forts des autres enfants écorchaient sa peau de mots pas méchants, qu'ils disaient. Des blagues de jeunes, qui lui font la leçon, sur ce qu'est être un vrai garçon. Et pas un de ces gars trop délicats. Ce n'est pas bien ça. N'est-ce pas ? Oublier les petites moqueries sur ses petites manies. Oublier les regards exaspérés, sur ce gars qui ne vient pas comme eux des beaux quartiers, bizutage au Conservatoire, c'est une tradition n'en parlons plus. Oublions. Sa délicatesse, fardeau qu'il déteste. Se faire violence pour prendre corps, mériter sa place. Mais garder ses convictions au fond. Oublier les erreurs, les peurs. Accepter d'être ainsi, peut-être, durcir un peu. Grandir surtout. Oublier. Ce petit garçon. Et construit son Lui, clair, fier et grand. Trouver sa Voix, l'apprivoiser, la maîtriser, l'offrir aux gens et leur prendre en retour, tout son besoin d'amour. Satisfait.
Informations en vrac
Céleste est : méticuleux, perfectionniste, presque maniaque. Impeccable le plus souvent. Ça lui donne la mauvaise manie de juger les gens sur leur apparence.
Céleste est : esthète, amoureux des beaux arts, des beaux gens, des belles âmes. Pas les parfaites forcément, simplement les belles. Matérialiste. Non pas pour posséder le plus cher et donner de l'importance qu'au matériel, mais plutôt posséder ce qu'il aime. Sa bibliothèque, ses étagères, ses murs sont trop remplis, de livres, de cd, d'illustrations, de bande-dessinées, de photographies, de sculptures, d'objets curieux, de morceaux de natures, d'artisanat, d'exotisme, de collections inachevées de toutes sortes.
Céleste est : actif sur les réseaux sociaux. Souvent connecté, il a presque tous les jours un nouveau statut de posté. Pour se sentir exister, voir les 'j'aime' s'aligner, faire taire tout le reste et se sentir satisfait.
Céleste est : végétarien qui tend à devenir vegan. Accro au thé. Panromantique. Ténor à la base, contre-ténor après un travail acharné. Passionné par les astres, les horoscopes et le tirage des cartes. Pas très sportif, même s'il doit entretenir son corps pour tenir sa voix, fait donc de la natation pour le principe et pour son dos. Proche de sa famille, il passera sa sœur et sa grand-mère avant beaucoup de choses dans sa vie.
Avis sur les "faits" de société
Quel est votre regard vis à vis de la société et des humains?
Il voudrait aimer les gens, profondément. Croire en l'humain. Il voudrait tellement trouver leur monde beau, croire en la société. Mais il a du mal Céleste, à trouver le beau dans la connerie humaine, à trouver le positif dans l'évolution de l'Homme, à envisager le futur avec un regard serein. Il voudrait être aimant, positif, serein, confiant. Il est méfiant, désabusé, inquiet. Il aime tellement la Création, l'Art, l'Amour dont l'être humain peut fait preuve, que voir qu'on a encore trouvé pire à faire le déçoit toujours un peu plus.
Que pensez-vous de la question des Androïdes ? Considérez-vous plutôt pour, contre ou neutre ? Croyez vous à la légende urbaine des androides doués de conscience? Si oui, pourquoi?
Passivement contre. Parce qu'il ne voit pas comment on peut être pour un remplacement du vivant par de la technologie, ni comment celle-ci peut-être autre chose qu'un ordinateur. Et du coup, il ne voit pas comment on peut être pour la liberté d'un ordinateur. C'est idiot. Ou alors il y a de quoi s'en faire. Donc sans forcément être contre les androïdes, qui sont des éléments bien utiles du quotidien, Céleste se positionne contre l'engouement de ceux qui les soutiennent. Même si cela ne reste que quelques mots de temps à autre dans une conversation, et non un acte militantisme de sa part. Les extrémistes réfractaires sont à ses yeux tout aussi incompréhensibles.
Histoire
- Encore une belle photo en élégante compagnie.
- Comment ça ?
Un petit déjeuner, appartement londonien. Le temps est clair ce matin. Céleste, son thé à la main, parcourt les pages d'un site people sur sa tablette, un peu absent, un peu lointain. Lointain comme le grondement sourd de sa colère, comme les pluies de sa tristesse qui battent violemment sur les parois de son cœur. Une fois de plus. Charly le rejoint, le temps de prendre son café et s'installe face à lui, attend qu'il reprenne, sans entendre le son d'un amour étranglé qui ne peut se taire et abdiquer. Une fois de plus. Une fois encore. Une fois de trop.
- Miss Leloir paraît comblée.
- Céleste... tu sais bien que ce n'est pas ça. On en a déjà parlé.
- Oh si. C'est CA. C'est toujours CA. Ce que tu nommes pas. Ce que tu ne veux pas voir. Sauf que je n'en peux plus. Je t'en supplie, fais quelque chose. Maintenant... Ou on arrête là.
- Je te l'ai déjà dit, je ne peux pas. Tu ne comprends pas.
- Je ne peux pas comprendre ? Je ne peux pas comprendre ce que ça fait de se balader avec une autre étiquette sur la gueule que 'normalité' ? Je ne peux pas comprendre ce que ça fait que d'être dans une autre case que la majorité de notre putain de société peut-être ? Ne te moques pas de moi... Et tu sais quoi, je le vis bien. On le vit bien. Je n'ai pas perdu ma famille, mes amis et encore moins ma carrière. Parce que la plupart des gens s'en foutent. Première nouvelle, le monde ne tourne pas autour de ta petite vie et la plupart s'en moque de savoir avec qui tu baises. Merde Charly. Tu as une famille tolérante, on est dans un milieu où ça n'a pas d'importance. Je ne comprends pas, je ne comprends pas pourquoi tu refuses tout ça. Pourquoi tu préfères t'afficher aux bras de toutes ces femmes alors que je suis là.
Le thé est laissé depuis longtemps, oublié près de l'écran qui affiche un couple élégant, souriant à l'objectif. Céleste est debout, n'arrive pas à rester en place. Alors il marche, un peu, se prend la tête entre les mains. Soupire, aussi. Pour garder son calme, pour calmer ses larmes qui menacent de perler. Il sent que c'est la fin, il ne pourra le faire changer d'avis, il ne peut continuer à subir toute cette vie. Dehors, la ville s'anime. Ortie le suit des yeux, un peu inquiète, perchée sur le radiateur près de la fenêtre. Il passe une main dans sa fourrure douce, lui tire un ronronnement appréciateur.
- Céleste, c'est pas si facile.
- Non je sais, ce n'est pas facile de vivre dans ton ombre, d'être ton secret honteux. D'être celui qui vit dans le placard que tu fermes derrière toi dès que tu sors. Je dois te voir vivre sans moi dès qu'on quitte cet appartement. Je dois te voir chaque jour faire comme si on se connaissait à peine, alors que tu m'aimes. N'est-ce pas ?
- Bien sûr, mais..
- Alors j'encaisse, comme d’habitude, alors que tu piétines mes sentiments, que tu les ignores dès que ça t’embête, comme si tout ce qu'on vivait était sale. Comme si ce que je ressens est honteux, dégueu. Tu me fais mal. Tu nous fait du mal. J'en arrive à avoir honte de qui je suis, de ce que je ressens, de toute cette histoire. Alors que ça devrait être beau et fort. Mais non. Tu me fais nous dégoûter, me dégoûter.
- Céleste...
- Fais quelque chose pour nous s'il te plaît.
- Céleste, ne pars pas.
- ... Bien.
Il reste. Se laisse embrasser, le regarde se saisir de son manteau et quitter leur appartement pour aller travailler, comme si la situation était clarifiée, qu'il n'y a plus de problème. Quelques minutes passent, il prend son portable, appelle son manager. Céleste confirme. Il sera sur la tournée au Canada, chantera chez les siens la prochaine saison. Il raccroche, lance une nouvelle conversation.
- ...Un bagage cabine, un bagage soute. Plus quatre autres bagages en supplément. Et j'aurai un chat en cabine avec moi.
- Bien, c'est noté. Un aller simple pour Montréal. Vous avez tous vos papiers ?
- Oui.
- Alors à ce soir sur notre vol, bonne journée sir.
- Merci, à vous aussi.
Il passe sa matinée à ranger ses affaires, trier celles qu'il emmène dans ses valises. Mettre les autres dans un carton qu'il laisse dans un coin du salon. Charly en fera ce qu'il voudra. Brûler, vendre, donner, jeter, qu'importe. Il ne sera plus là pour voir ça. Le plus compliqué est de faire entrer Ortie dans sa cage. La chatte est assez caractérielle et n'est pas une habituée des longs voyages. Le trajet sera difficile pour elle. Pour Céleste, c'est juste comme rentrer à la maison. Et, lorsqu'à l'arrière du taxi Londres défilent sous ses yeux, il n'a pas l'impression de lui faire ses adieux. Tout cela va trop vite, il a l'impression d'être en dehors de sa vie, en dehors de son corps depuis la conversation de ce matin. Trois ans de vie commune qui meurent ainsi, à cause d'un non-dit. Il n'a pas encore réalisé. Ne réalise pas non plus une fois embarqué, percute seulement à son arrivée. Lorsqu’il récupère ses papiers, qu'on lui dit un « Bon retour chez vous », que sa sœur lui saute au cou, que MamieCoeur et toutes ses couleurs lui sort un « Tu nous avais presque manqué mon petit Ciel. »
MamieCoeur. La mère de son père, Madame Francoeur, veuve depuis trop longtemps pour que Céleste se souvienne de son grand-père. Le premier endroit qu'il retrouve, avant son chez lui, c'est la petite maison de sa mamie. Le trajet s'est passé calmement, malgré les miaulements d'Ortie que le voyage a apeuré. Nastasie au volant, lui et sa grand-mère à l'arrière. Une fois rentré chez elle, Céleste inspire à plein poumon. Les cinquante-six thés différents alignés dans la cuisine embaument l'air de leurs fragrances légères. Ils se retrouvent dans le salon, Céleste au milieu du canapé, les pieds de sa sœur sur les genoux alors qu'elle papouille le chat, MamieCoeur assise à ses cotés est en train de tresser les longs cheveux blonds de son garçon de ses petits doigts agiles. Ça fait teinter ses bracelets dorés, moment hors du temps. Et ils passent le reste de la journée à radoter, discuter. Rien d'important, entre deux rires et trois souvenirs. Céleste s'endort à moitié, pleure un peu aussi, avant que Nastasie se foute de lui comme la digne sœur qu'elle est.
Tu te souviens ? De maman et papa qui t'avaient inscrit aux mêmes cours de musique que ta sœur ? Tu te souviens, à quel point tu voulais faire comme les autres gamins et que tu avais commencé le hockey pour qu'ils arrêtent de t’embêter à la récré ? Tu te souviens, du jour où les parents t'ont mis de force à la chorale de l'école, que tu as refusé de chanter, jusqu'à ce que la maîtresse te fasse passer seul devant tout le monde ? Tu te souviens du premier spectacle, de MamieCoeur qui t’applaudit, des parents un peu surpris, pour une fois pas absents, de Nastasie qui crie un « C'EST MON FRERE IL GERE TROP » au travers la foule alors que, tout rouge, tu savoures comme un prince toute cette attention ? Tu te souviens des vacances à la mer, avec les cousins chiants et qu'on allait faire voler le cerf-volant ? Du froid d'hiver qui nous faisant rentrer en courant, couvert de neige et le corps tremblant ? Tu te souviens des parties de jeux-vidéos qui finissaient en drame, parce que toi ou ta soeur avait triché pour gagner, que tout le monde se réconciliait autour d'une tasse de thé, avec un chocolat praliné ? Puis de Madame Jasmin avec ses grandes lunettes, qui t'a pris sous son aile, pour te faire chanter et t'encourager. Des parents qui se sont absentés pour le travail, de plus en plus souvent alors que tu grandissais. Du concours que tu as remporté, encore garçon avec ta voix de soprano. Du Conservatoire de Musique, avec ces premiers amis, ces premières rivalités. De MamieCoeur qui t'a encouragé à postuler pour cette bourse. De ton premier voyage en Europe, jusqu'à Londres d'ailleurs, puis Venise, pour suivre les cours de chant lyrique. De ta sœur qui passe te voir, des soirées qui finissent tard, beaucoup trop arrosées, parfois sur un trottoir à refaire le monde jusqu'à ce que le soir tombe. De ton premier solo, ce temps suspendu entre de battement à la fin de ton morceau, puis le silence, avant la slave d'applaudissement, apothéose des sens. Tu te souviens Céleste, dis ?
- Bon, et c'est quand que tu nous ramènes une charmante future madame Francoeur ?
- Nastasie, ton frère est pédé !
- Mais non Mamie, il est bi, tu le sais bien.
- C'est ça, c'est ça. On me l'a fait pas à moi. Mon petit Ciel, j'ai hâte que tu nous ramènes un charmant jeune homme. J'ai pas envie d'avoir une horrible belle-petite-fille, surtout que mes amies vont jaser si finalement tu n'es plus gay.
- Mais il n'a jamais été gay !
- C'est ça, appelez moi Bertrand aussi. Non mais... Tout le monde au lit, allez zou. Céleste, tu as une mine horrible, je ne veux plus te voir avant que tu aies huit heures de sommeil. Et toi Nastasie, ton chien et ton époux t'attendent, je sais pas auquel des deux tu manques le plus cela dit. Hop hop hop.
Il quitte sa grand-mère le lendemain, retrouve son chez lui, sa toute petite maison qu'il s'est achetée avant de s'installer à Londres. Ortie disparaît vite entre les meubles. Céleste prend le temps de déposer toutes ses valises dans un coin du salon, avant d'ouvrir une à une chaque fenêtre. L'air frai qui s'engouffre le fait frissonner, mais il se sent bien. Mieux. Les mails de son agent défilent sur son écran. Programme de la saison, lieux où il peut travailler, personnes à qui se présenter. Il ignore au mieux les tentatives d'appel de Charly, n'ouvre pas ses messages. Il a besoin de faire le point, de s'éloigner de toute cette histoire.
Alors il se plonge à corps perdu dans le travail, pose son esprit et son cœur dans un coin de chez lui, avec ses affaires déballées, un peu oubliés. Répétitions qui s’enchaînent, représentions qui commencent. Les salles se suivent, ne se ressemblent pas, mais au fond si, ce sont toutes un peu les mêmes. L'avion, puis le train, un trajet en voiture. Des nouvelles des parents, de loin, un appel de sa sœur qui part en Afrique le lendemain. Puis MamieCoeur qui l'embrasse alors qu'il est de passage. Tourbillon d'un semblant de vie, pour récupérer sa lumière, son âme aussi. Une ovation, il salue. Derrière lui l'orchestre sublime sa voix, les œuvres s’enchaînent, il se perd, s'oublie, se retrouve, reconstruit. Des choses différentes, avec d'autres gens. Retrouve un équilibre, un peu. Projet d'un opéra, une reprise qu'il affectionne de l’œuvre de Britten. Toujours pas de pause dans son quotidien, il a trop peur de se confronter à ce qu'il a laissé. Non plus Charly, depuis un an que cette histoire est terminée, il a pu mettre au clair la situation avec lui. Mais plutôt tout le reste, ce qui en découle, ce qu'il n'a pas voulu voir. Ce qu'il oublie souvent. La solitude, le temps qui passe. La peur surtout. Celle qui lui sert l'estomac lorsqu'il doit quitter la scène, lorsqu'il doit rentrer chez lui. Celle qui lui fait enchaîner les représentations, pour être sur de ne pas repasser dans l'ombre, de ne pas disparaître. Il a besoin d'exister aux yeux des gens. Sentiment d'insécurité qu'il a mis de côté depuis tout petit, alors que ses parents n'étaient pas assez présents, assez rassurant quant à leur affection pour leurs enfants, pour lui. Que Charly a ravivé malgré lui, en le reléguant au second plan de sa vie, en négligeant, méprisant leur relation. Lui par la même occasion. En trois ans de vie, ça laisse une trace, ravive une blessure. Qu'il ne voit pas.
« La tournée du jeune contre-tenor Céleste Francoeur n'aura pas lieu. Le chanteur lyrique qui allait présenter plusieurs concerts en Europe s'est vu contraint d'annuler ses représentations pour des soucis de santé. »
Le petit billet passe entre les grands titres d'un site spécialisé. Céleste éteint sa tablette, déconfit, et se laisse aller contre le hublot de l'avion. Retour chez lui, pour quelques mois de repos forcé. Sans chant dans un premier temps. Sa montre égraine les secondes à son poignet, il s'oblige à détourner les yeux de l'objet lorsque l’hôtesse lui demande si tout va bien. Une grimace doit s'afficher sur ses traits, alors qu'il hoche doucement la tête. Elle lui répond par un sourire contrit, et continue son chemin parmi les passagers. Elle avait un joli sourire. Et un timbre de voix plaisant, clair et doux. Il ferme les yeux, essaye de dormir. Montréal, encore. Point d'un nouveau départ. Pour l'instant, cela à le goût amer d'une fin.
L'écho de la sonnette se perd dans la petite maison, alors qu'il devine l'agitation, debout sur le perron. Puis la porte s'ouvre. Retour à la maison. MamieCoeur le sert contre sa poitrine, ce qui l'oblige à se tordre vers elle, plié en deux dans son parfum chaleureux. Premier vrai sourire de la journée qui étire ses lèvres gercées par le froid. Puis il se laisse emporter par les mots, par la chaleur de sa voix, par le tourbillon de vie qu'est sa Grand-mère.
- Mon petit Céleste, j'ai appris la nouvelle, comme c'est triste. Ça va tout de même toi ? il hoche la tête Bien, je m’inquiétais mais tu n'as pas une trop sale tête, alors je te crois. Aller entre, ne reste pas planté là. Le voyage était bon ? Oui, parfait. Ils se dirigent vers la cuisine, pleine d'odeurs de cuisson. Céleste pose son manteau en passant. Tu as pu retrouver ton chez toi ? Pas trop en sale état j'espère, avec ton chat et la poussière... Ah oui, c'est vrai je me souviens, tu as un androïde. Comment il s'appelle déjà ? Quoi ? Il n'a toujours pas de nom ? Tu sais que cette petite machine serait bien mieux avec un prénom, tu ne le siffles pas pour l'appeler j'espère... Appelle le du genre.. Chausson. Ou Rubis ? Ou Poulet ? Non ? Céleste nie de la tête, ne voit pas l’intérêt de nommer cet être métallique qui entretient son chez lui pendant ses absences. Il n'a jamais donné de nom à son pc, pourquoi le faire maintenant avec une autre technologie ? Au fait, j'ai appelé ta sœur, elle passe avec son époux, ça te dérange pas j'espère ? Bien sûr que non. Et pour une fois, on va peut-être pouvoir profiter d'un repas calme... Ne fais pas cette tête innocente Céleste, je te connais. Toi et William êtes infernaux quand vous vous y mettez, vos chamailleries sont épuisantes. De vrais enfants. Je sais que tu grimaces dans mon dos hein ! Non mais, tu crois que je ne te vois pas peut-être ? Il la laisse continuer, réagissant silencieusement à son bavardage sans pause. D'ailleurs, tu as toujours ton régime bizarre d'herbivore ? Oui oui, je sais, je ne critique pas elle lève les mains en l'air, le torchon qu'elle tient suit le mouvement circulaire et j'ai fait un bon petit plat pour toi et Nastasie. Aucune matière animale, blablabla. Vos repas sont bien tristes tout de même. Rooh je sais, je te taquine ne t'en fais pas, chacun ses choix. ça mijote, frétille et crépite sur le feu. Céleste pose sur elle un regard tendre et file un coup de main quand il peut. Tiens, prends ces assiettes et va mettre la table. Ils ne vont pas tarder à arriver.
Nastasie se présente, William à son bras. La femme l'embrasse fort sur les deux joues, pour le plaisir de voir s'étaler la trace de son rouge à lèvres sur sa peau claire. Ça la fait ricaner, alors qu'elle relâche son chien, J.B., qui part frotter sa truffe contre la jambe de Céleste. Signe d'affection ou facilité pour se gratter le nez, la vieillesse le rendant flemmard... Il ne sait pas trop. Rit moins, faussement vexé et repousse en douceur le chien pour aller serrer William dans ses bras, dans une accolade amicale. Les deux hommes s'apprécient, Céleste est heureux pour sa sœur de la voir profiter de la vie avec quelqu'un comme lui. Et malgré qu'il ne parle que peu à cause de ses cordes vocales, cela ne les empêche pas de se chamailler, ou de taquiner les femmes de la tablée, sourire complice aux lèvres. Le repas est divin, comme toujours. La conversation légère. C'est le genre de plan dans les films où le protagoniste regarde la scène, souriant doucement, où les sons s'assourdissent, pour laisser s'élever une paisible mélodie. Moment hors du temps, qui s'estompe dans les souvenirs pour ne laisser que cette chaleur diffuse dans le cœur. Sauf que.
Le café est servi, encore fumant dans la tasse. Le silence se fait, calmement. Céleste voit sa grand-mère jouer avec sa cuillère, le regard trop sérieux pour ne pas être inquiété. Il tend ses doigts vers elle, lui touche la main. Ça lui fait relever les yeux, inspirer longuement, et prendre la parole. La suite est un peu floue, Céleste n'aime pas les mots qu'il entend, n'aime pas le sens que cela prend. Elle dit que ce n'est pas si grave. Qu'elle va être prise à temps pour suivre un traitement. Que cela devrait juste être une épreuve difficile à passer, mais pas insurmontable. Qu’égoïstement elle est heureuse que ses deux petits-enfants soient à ses côtés. Qu'elle les aime. Et qu'il ne faut pas pleurer bande de caribou sinon elle va pleurer aussi.
Tumeur.
Tu ne m'auras pas.
- Né un 3 Novembre.
- Parents délaissants, mais pas méchants.
- A sœur de trois ans son aînée, Nastasie.
- Est un petit garçon un peu discret, pas mauvais, ni très doué. Se fait un peu charrier parce qu'il fait de la musique avec sa sœur. Et pas de sport. Demande à se parents de l'inscrire au hockey, ce qu'ils acceptent s'il s'investit plus dans ses cours de solfège et piano. Et qu'il participe à la chorale à l'école. Il le fait de mauvaise foi.
- Se révèle être un bon choriste avec une voix claire et une oreille musicale. Préfère tout de même jouer avec ses amis et glisser sur la glace, avec les compétitions le week-end.
- Est soutenu dans tous ses projets quels qu'ils soient par sa Mamie qu'il voit régulièrement, elle est un peu la gardienne de la petite famille et s'occupe souvent du frère et de la sœur.
- Gagne un concours de chant pour enfant, après quoi il accepte de prendre des cours avec Madame Jasmin qui l'épaulera jusqu'à son entrée au Conservatoire de Musique de Montréal.
- Obtient une bourse et part en Europe compléter sa formation. Se forme au chant baroque, où sa voix de contre-ténor commence à être exploitée, évoluant d'un ténor à registre plus haut. Passe par Londres et Venise. Revient en Angleterre pour travailler sur un répertoire plus contemporain et finit par intégrer l’opéra A Midsummer Night's Dream de Benjamin Britten où il chante Obéron. Lance sa carrière.
- Nastasie passe régulièrement chez lui lorsqu'elle est en voyage pour son boulot de reporter. Ils se rapprochent beaucoup pendant ses années. Elle lui laisse son chien de temps en temps, un bouledogue français appelé J.B.
- Rencontre Charly après une tournée où il passe par Rome et Paris. L'homme est un metteur en scène visionnaire et les deux êtres s'entendent bien. Ils s'installent finalement ensemble et passent trois ans en couple, sans que Charly n'en parle à personne et n'ose assumer sa sexualité.
- Céleste le quitte, retourne au Canada, se lance dans une tournée de concerts, participe à de nouveaux projets, jusqu'à devoir s’arrêter suite à un hématome sur ses cordes vocales. - Rentre se soigner.
- Apprend que sa Grand-mère à un cancer du sein et doit entrer en institut spécialisé pour le traiter.
Derrière l'écran
PSEUDO : Tomtom
ÂGE : 23 je crois.
OÙ AS-TU CONNU EXANTROP ? DC.
AVATAR : Thranduil - LotR (crédit Lélé pour la beauté des vava, merci beaucoup krkr)
UN PETIT MOT ? Trop d'amour et de mauvaises idées par ici krkr
J'AUTORISE UNE INTERVENTION SAUVAGE DU PLAISANTIN ? Oui / Non